Gendarmerie

Compagnie de Liège

Meeting socialiste-anarchiste

Un meeting socialiste-anarchiste, auquel assistaient 70 à 80 personnes, a été tenu hier, de 9h à 11heures du soir, au (?), quai de la Batte à Liège. Les citoyens Piedboeuf, Cardinal, Forêt et Volant y ont pris successivement la parole et ce à plusieurs reprises. Le premier nommé Piedboeuf, après avoir constaté les progrès faits par les socialistes depuis un an, conseille aux ouvriers de former des corporations et des syndicats, de marcher avec ensemble pour réclamer paisiblement et le cas échéant prendre par la force le suffrage universel, la personnification civile des sociétés ouvrières, l’abolition du remplacement et de l’armée permanente et si une armée est jugée nécessaire, qu’elle soit démocratique, il demande aussi la gratuité de la justice, l’instruction gratuite, laïque et obligatoire afin que la bourgeoisie et l’aristocratie ne soient plus seules maîtresses du pouvoir.

Le citoyen Cardinal monte ensuite à la tribune et au milieu d’un tumulte, de provocations et de discussions qui ont lieu dans l’auditoire entre socialistes et anarchistes et où ceux-ci semblent être le plus grand nombre, combat les théories de son prédécesseur, dit que celui-ci est payé pour donner des meetings, attaque les membres du comité et les meneurs du parti ouvrier, qui se gorgent de viande et vivent en parasites au détriment des ouvriers qui les paient et qui crèvent de faim ; il préconise la révolution purement et simplement, disant que la société est pourrie, qu’elle doit être renouvelée et montre les pays de suffrage universel tels la France, la Suisse et l’Allemagne où l’ouvrier est tout aussi malheureux qu’en Belgique.

Les citoyens Piedboeuf, Forêt et Volant répondent alors à ce dernier, conseillant aux ouvriers de se grouper et finalement proposent, ce qui est accepté, de donner dimanche prochain, 22 courant, à 3 heures, un meeting contradictoire entre socialistes et anarchistes, rue Neuve 18, en cette ville.

Ce meeting s’est terminé sans autre incident et l’ordre n’a pas été troublé. La présence d’aucun militaire n’y a été remarquée.

17 mai 1887

XV A 58