Boucher Louis-René. Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York
Maince Emile. Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York.
Mocquet Georges Gustave. Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art.
Labeyrie Romain. Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York

Audience des 10, 12 et 13 juillet 1897*

Fabrication et émission de fausse monnaie.

Neuf inculpés, les nommés Maince (Emile) 23 ans, Lance (Camille) 21 ans, fille Hubert, 22ans, Mocquet (Georges) 21 ans, fille Labeyrie (Anne-Charlotte) 14 ans, veuve Labeyrie, 48 ans, fille Labeyrie (Jeanne) 16 ans, Boucher (Léon-Alphonse) 27 ans, Boucher (Louis-René) 22 ans, comparaissent sous l’accusation d’avoir à Bruxelles et en France contrefait ou altéré des monnaies d’argent ayant cours l égal et participé à l’émission des dites monnaies, sachant qu’elles étaient contrefaites. Le 30 juillet 1896, Maince et Lance étaient arrêtés à Etampes au moment où ils venaient d’émettre chez plusieurs négociants de la ville des pièces fausses de 5 francs à l’effigie de la République française. Ils étaient porteurs de 43 pièces fausses semblables. Ils refusèrent d’abord de faire connaître leurs noms et de répondre aux questions qui leur étaient posées. Mais leur identité ayant été vérifiée, l’un et l’autre reconnurent qu’ils faisaient partie d’une bande de faux monnayeurs.

L’information a établi à leur charge et à celle de leur co-accusés, deux séries de faits de fabrication et d’émission de fausse monnaie commis à Bruxelles et à Paris. La première remonte au cours de l’année 1895. A cette époque les deux frères Augustin et Romain Labeyrie, qui plus tard ont été arrêtés en Belgique, s’étaient rendus à Bruxelles où ils s’étaient livrés pendant quelque temps à la contrefaçon de monnaies d’argent françaises et belges ; puis vers le commencement de décembre, ils étaient rentrés à Paris et s’étaient et s’étaient installés au domicile de leur mère, la veuve Labeyrie. Là, de complicité avec elle et avec la fille Hubert, maîtresse d’Augustin, qui était venue habiter avec eux, ils avaient fabriqué des pièces françaises de 2 francs, que les deux femmes avaient mises en circulation. Ensuite, vers la fin de décembre, ils avaient opéré, avec d’autres complices, dans d’autres locaux, en se partageant en deux groupes. D’un côté, Augustin, sa sœur Léonie, âgée seulement de 14 ans à ce moment et la fille Hubert étaient fixés 70 rue Truffaut et, avec l’aide d’Alphonse et Louis Boucher et de Moquet, ils avaient repris la fabrication des pièces fausses de 5 francs. D’un autre côté, Romain Labeyrie, sa maîtresse Anaïs Henry et sa sœur Anne-Charlotte Labeyrie, avaient fabriqué de fausses pièces françaises d’argent, dans une chambre située 154 rue Oberkampf et en avaient opéré l’émission. Plus tard, encore, Maince s’était joint à eux et s’était associé à leur coupable industrie. La seconde série de faits s’est produite dans les circonstances suivantes : Romain Labeyrie n’avait pas tardé à retourner à Bruxelles avec Maince, où toute la bande s’était empressée de les rejoindre. Là, tous ces malfaiteurs s’étaient divisés en deux bandes, correspondaient entre eux, se prévenant en cas de danger et se concertaient pour opérer l’émission de pièces fausses. Enfin en France où la plupart des accusés étaient rentrés, en juillet 1896, Alphone Boucher et Léonie Labeyrie, qui résidaient alors à Clichy, 42 rue de Paris, avaient fabriqué et émis dans cette localité des monnaies françaises d’argent contrefaites.Ils avaient eu pour associé, depuis quelques jours, le nommé Reistroffer, condamné aux travaux forcés à perpétuité, et qui les avait quittés bientôt, pour aller 27 rue Duhesme à Paris, exercer la même criminelle industrie avec Mocquet et Louis Boucher. Ces deux hommes coulaient les pièces et Reistroffer les ponçait ; chacun d’eux participait à l’émission. De plus Maince et Lance fabriquaient dans un logement, rue Oberkampf, de fausses pièces de 2 francs et c’est en émettant à Etampe ces pièces à l’effigie de Napoléon III et de la République que Maince et Lance furent arrêtés. La veuve Labeyrie ne s’est pas bornée à émettre elle-même des pièces fausses. Le 29 mai 1896, elle a été surprise au moment où elle venait de faire émettre par la plus jeune de ses filles, nommée Louise et âgée de 10 ans, une pièce de 2 francs fausse, chez un pharmacien de la rue de Rivoli, cette pièce venait d’être refusée ailleurs.

C’est aux dates des 23 et 24 février 1896 que les deux frères Roamin et Augustin Labeyrie, ont été arrêtés à Bruxelles. Les perquisitions faites à leurs domiciles, ont amené la saisie de divers objets à l’usage des faux-monnayeurs…

Après deux heures de délibération, le jury rapporte un verdict négatif en ce qui concerne Louis Boucher et Labeyrie Lucie, dont la cour prononce l’acquittement et de culpabilité à l’égard des autres accusés, mitigé par l’admission de circonstances atténuantes. En conséquence, la Cour condamne Moquet, la veuve Labeyrie et Alphonse Boucher, chacun à cinq années de réclusion ; Léonie Labeyrie, en raison de son jeune âge, est envoyée dans une maison de correction jusqu’à 20 ans. En ce qui concerne Maince, Lance et Hubert, application leur est faite de l’article 138 du code pénal, qui déclare exempt de peine ceux qui avant la consommation des crimes et avant toutes poursuites en ont donné connaissance et révélé les auteurs aux autorités constituées, ou qui même après les poursuites commencées ont procuré l’arrestation des autres coupables.

L’Echo de Versailles et de Seine-et-Oise 18 juillet 1897

*Cour d’assises de Versailles