Extrait du Père Peinard n°2 première quinzaine d’octobre 1894. Série londonienne.

Cliquer sur l’image pour lire la brochure.

Cette brochure a parfois été considérée comme l’expression d’une nouvelle orientation pour les anarchistes après l’échec de « la propagande par le fait », lors de la période des attentats de 1892-1894.

Mais comme le dira Pouget dans la Sociale n°67 du 16 août 1896, à propos de la publication de ce texte : « …Il y a bougrement plus longtemps que cela que je serine l’action syndicale. J’en étais un acharné partisan à une époque où il* ignorait encore les beautés du guesdisme. »

En effet les anarchistes n’avaient pas attendu 1894 pour entrer dans les syndicats, ils y étaient depuis l’origine.

Dès le Congrès de Lyon en 1878, Ballivet, membre de l’AIT, se lança dans une violente diatribe contre les lois, contre le parlement. Lombart de Marseille y expliqua que le syndicat se suffisait à tout, dans et après la révolution.

En octobre 1879, Bernard participa au congrès national ouvrier de Marseille où il présenta le rapport sur le travail des femmes.

Au congrès du Havre en 1880, sous l’influence des anarchistes, on déclara que le prolétariat ne pouvait arriver à son émancipation par la voie pacifique et que la Révolution sociale par la force restait la seule solution définitive possible. Kahn s’y prononça pour le communisme libertaire, contre les collectivistes ce qui fut admis par le congrès.

Lors du congrès de Reims en 1881, le rapport de la commission sur les questions doctrinales déclara que le communisme libertaire est la société de l’avenir.

En 1881, sous l’impulsion de Bernard, naquit la Fédération des chambres syndicales lyonnaises.

Bernard fut délégué au congrès constitutif de la Fédération nationale des syndicats en octobre 1886 à Lyon, le manifeste lu à ce congrès montrait une volonté d’indépendance des syndicats : « Travailleurs, séparez-vous nettement des politiciens qui vous trompent ».

Dès la fin 1887, les anarchistes préconisèrent la grève générale, idée reprise au 3e Congrès  national des syndicats ouvriers à Bordeaux en octobre 1888 qui engagea les travailleurs à se séparer des politiciens qui les trompaient.

En 1888, sur Paris, les anarchistes participèrent également à la création de la « Fédération des chambres syndicales et groupes corporatifs indépendants du département de la Seine » pour s’opposer avec les blanquistes à la main-mise des possibilistes sur la Bourse du travail de Paris.

Ce ne sont que quelques exemples de l’intervention constante des anarchistes au sein des syndicats. Même si cette présence  fut souvent tactique, s’alliant avec tel ou tel autre courant du socialisme pour déloger tantôt les possibilistes, tantôt les guesdistes de leur position de domination. Elle prit aussi une dimension plus positive et autonome avec la création des Syndicats des hommes de Peine à Paris, Nantes, Saint-Étienne ou Lyon qui furent de véritables précurseurs de syndicats non corporatistes à orientation anarchiste au sein des Bourses du travail.

Comme le disait Pouget, les anarchistes n’ont pas attendu 1894 pour entrer dans les syndicats.

Sources :

Les fondateurs de la CGT à l’épreuve du droit par Pierre Bance. Éditeur La Pensée sauvage 1978.

La grève générale de Robert OWEN à la doctrine syndicaliste par André Saulière.Éditions  Imprimerie de l’académie et des facultés Bordeaux 1913.

L’anarcho-syndicalisme à Lyon (1880-1914) par Michèle Marigot. Editeur Atelier de création libertaire 2016

*il s’agit de Jaurès