Né le 16 novembre 1867 a Saint-Jean de Bonnefonds (Loire), mort le 20 juillet 1908 à Paris, ajusteur mécanicien, anarchiste à Lyon, Bruxelles et à Londres.

Il vint très jeune habiter avec ses parents à la Mulalière, à Lyon, et fut à cette époque employé à l’usine Tragvous.

Il ne tarda pas à lier connaissance avec les socialistes et les anarchistes de la ville et fit peu après partie du groupe Ni Dieu, ni Maître, du quartier de la Mouche. A la fin de 1887, il partit pour Paris. Le maire de la Mulatière tira au sort pour lui et Dufournel fut envoyé à Grenoble; le régiment ne le retint pas longtemps et en 1888, le soldat anarchiste désertait, emportant avec lui ses effets militaires.

Arrêté quelques mois après et condamné à un an de prison, Dufournet fut gracié au bout de dix mois et réintégré au corps pour y achever son temps de service; soldat au 22e de ligne de Montélimar il déserta de nouveau à la fin de l’année 1891, et partît à l’étranger avec ses effets militaires, il se rendit en Belgique accompagné d’un de ses amis nommé Blandin. Tous deux collaborèrent au journal la Réforme. Il allait souvent à Londres et était un des amis intimes de Francis, l’auteur présumé, à l’époque, de l’explosion du restaurant Véry.

Dufournet était en relations avec les anarchistes militants de Paris, il venait fréquemment en France et se chargeait des communications des révolutionnaires anglais.

Lors de son dernier voyage, il avait amené son amie anglaise.

Pierre Dufournel avait été arrêté à Paris le 17 juillet 1892 avec Parmeggiani. Ils arrivaient de Londres avec l’Allemand Frugendorf (le Petit Charles).

Le 9 août 1892, de nouvelles perquisitions avaient été faites à la requête de M. Atthalin, par M. Touny, commissaire aux délégations judiciaires, qui s’était fait accompagner par Dufournel, lequel était gardé par des agents des brigades spéciales.

Le magistrat s’était d’abord transporté 137 rue du Château, à l’hôtel du Parc. C’était là où, paraît-il, Dufournel avait habité un moment avec sa maîtresse, Alice Spencer.

Letellier et sa femme y avaient retenu un cabinet meublé le 15 juillet. Ce jour-là, Mme Letellier était restée seule avec la compagne de Dufournel. Toutes deux avaient passé la nuit là.

Le lendemain matin, Letellier était arrivé avec un homme qu’une témoin, reconnut pour l’anarchiste Schouppe.

Puis Letellier resta seul avec sa femme ; le lendemain les agents de la sûreté vinrent établir leur surveillance. Le soir, vers huit heures, Mme Letellier rentrait avec son amie l’Anglaise, qui s’en allait sitôt le retour du mari, lequel arrivait vers dix heures et demie, accompagné parfois par un camarade.

Le 28 août 1892, la 9e chambre correctionnelle de Paris le condamna , selon l’Echo de Paris, à huit jours de prison, pour insulte et rébellion aux agents (6 mois de prison d’après un autre journal).

Il avait été traduit le 9 novembre 1892 devant le conseil de guerre à Lyon pour désertion à l’étranger en temps de paix.

Le colonel Martin, du 96e de ligne, présidait . Après lecture de l’acte d’accusation, l’interrogatoire commença :

D. Pourquoi avez-vous déserté ?

R. Parce que je ne voulais pas être soldat.

D. Votre père est mort de chagrin en apprenant votre conduite.

R. Non, il est mort de faim. Comment voulez-vous que je ne sois pas anarchiste ? Je considère que c’est le seul parti possible et qui puisse soulager mon existence.

Dufournel fit à ce moment une longue profession de foi anarchiste.

D.Vous avez été expulsé de Belgique?

R. Oui, pour complot contre Sa Majesté le roi !

Après la plaidoirie et le réquisitoire, le président demanda à Dufournel s’il avait quelque chose à dire pour sa défense.

« Je suis anarchiste, a-t-il répondu ; je le serai toujours, mais jamais je ne serai soldat ! »

Le conseil rapporta un verdict condamnant Dufournel à cinq ans de travaux publics. Durant son procès à Lyon, Alice Spencer demeurait à La Mulatière, près de Lyon, et recevait des secours des anarchistes lyonnais.

Il aurait été envoyé dans un bataillon en Afrique du Nord.

Il ne semble pas qu’il puisse s’agir de Prosper Dufournel recruté comme indicateur par la police anglaise et qui opérait sous le pseudonyme « Cabot », de mars 1900 jusqu’à avril 1904.

Le Libertaire annonçait son décès le 20 juillet 1908 à l’hôpital Tenon de Paris.

SOURCES :

La Révolte 20 août 1892 — Le Père Peinard, 31 juillet, 20 novembre 1892 — Archives de la Préfecture de police Ba 1508 — Le Libertaire, 26 juillet 1908 — Le Radical 27 juillet, 10 août 1892 — La Justice 23 juillet 1892 — La Petite république 29 août 1892 — Gil Blas 11 août 1892 — Echo de Paris 4 septembre 1892 — La Justice 10 novembre 1892 — Le Rappel 10 novembre 1892 — Le Figaro 10 novembre 1892 — Note Rolf Dupuy — Anarchismes et anarchistes en France et en Grande-Bretagne, 1880-1914 : Échanges, représentations, transferts par Constance Bantman.