L’anarchie à St-Ouen

On connaît à St-Ouen M. Viard, cet aimable anarchiste, marchand de vernis, rue des Rosiers,lequel trouve toujours dans les réunions bon nombre de gogos pour l’écouter et l’applaudir même.

M. Viard. on l’avouera, a plutôt l’aspect du bourgeois bedonnant que d’un sinistre anarchiste et dans ses rapports, c’est l’homme le plus sociable du monde. Quand il développe à la tribune tes théories, cet homme est renversé. Descendu de la tribune, M. Viard reprend son air bourgeois, et ma foi, il n’est pas désagréable de prendre un Bock avec lui.

M. Viard est en ce moment en Angleterre, où on assure qu’il a des intérêts qui l’appellent souvent. Certains bruits que nous n’avons pas à relater, courent sur la nature de ces intérêts.

M. Viard, n’est pas inscrit sur la liste électorale de St-Ouen, pourquoi ?

Depuis quelque temps, M. Viard a pris à son service comme ouvrier, un jeune homme du nom de Mathieu. Mathieu s’est présenté souvent à la tribune dans les réunions de St-Ouen. Il a développé les théories anarchistes avec la dernière véhémence. Nous l’avions déjà écrit, il a souillé la tribune par son ordurière éloquence.

Alphonse Bertillon (French, 1853–1914)
Mathieu. Gustave., 1880s–90s
Albumen silver print from glass negative;
The Metropolitan Museum of Art, New York, Gilman Collection, Museum Purchase,

Mardi, le commissaire de police. M. Labussière, faisant l’intérim de M. Daltroff, se rendait au domicile de Mathieu, rue des Rosiers, chez M. Viard, accompagné de plusieurs gendarmes qu’il avait requis, pour procéder à l’arrestation de l’anarchiste, M. Labussière, était porteur d’un mandat d’amener délivré par le procureur de la Rupublique.

Nous croyons savoir que la politique est étrangère à cette mesure.

A deux reprises différentes, Mathieu, se serait mis en rébellion contre les agents,qui avaient voulu l’arrêter, avenue des Batignolles à la sortie d’une réunion chez Labrie, puis au concert Evrard place des Ecoles.

Un agent aurait été maltraité par les amis de Mathieu, hommes et femmes, qui le délivrèrent.

Quand le commissaire de police, s’est présenté au domicile de Mathieu, celui-ci prévenu sans doute, n’était plus la. Le magistrat craignant être victime d’une mystification et en vertu de l’ordre dont il était porteur, requit un serrurier et fit ouvrir le domicile de Mathieu.

Mathieu était bien réellement absent.

Journal de Saint-Denis 24 août 1890

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