
Couverture du Néo-naturien
Préfecture de police
Direction générale des recherches
2e brigade
3e division
1er bureau
Réunion du groupe les Naturiens
Paris, le 12 février 1896
Rapport
Hier soir a eu lieu, salle Bouju, 69 rue Blanche, une réunion du groupe « Les Naturiens ».
Sept personnes y ont assisté ; on n’a pas formé de bureau.
La séance a été ouverte à 10 heures.
Paul Pinet s’est plaint de ce qu’un individu qu’il soupçonne d’appartenir à la police, soit venu demander des renseignements sur lui chez son concierge et aussi à l’atelier où il travaille actuellement rue Vavin.
Il craint qu’il y ait un « mouchard » parmi les membres du groupe.
Léo Brissac répond qu’il a supporté les mêmes tracasserie et que tous ceux qui fréquentent les réunions en étant l’objet, il n’y a pas lieu de s’en préoccuper.
Une discussion s’engage ensuite entre Brissac et Gravelle sur le point des savoirs qui, du paysan ou de l’habitant des grandes villes, est le plus près de l’état naturel.
Brissac prétend que c’est les paysans, mais Gravelle croit que c’est les citadins.
Gravelle fait ressortir que le paysan n’a en effet aucun souci de l’hygiène, qu’il se nourrit mal, s’habille sans souci des saisons et s’astreint aux plus durs travaux, alors que l’ouvrier des villes sait mieux se soigner et jouir, lorsqu’il le peut, du spectacle de la nature.
Gravelle admet cependant que le braconnier est lui aussi un naturien.
Il développe ensuite ses théories habituelles sur le partage de la France entre ses habitants qui, selon lui, pourraient tous vivre dans l’abondance, sans quitter le sol nationale et sans travailler.
Bariol fait connaître qu’il a reçu récemment la visite d’un reporter du journal Le Courrier, qui lui a demandé des renseignements sur les idées du groupe et sur le banquet qui doit avoir lieu le 29 du courant, lui promettant de faire rédiger un article à ce sujet.
La séance est levée à 11 heures.
Le commissaire de police.
Archives de la Préfecture de police Ba 1508
Lire le dossier Les Naturiens, des anarchistes précurseurs de l’écologie politique