Préfecture de la Haute-Savoie
Cabinet du préfet
Direction de la sûreté générale
Cabinet du Directeur
Annecy le 17 août 1894
Monsieur le ministre,
Vous n’ignorez pas que si une entente complète existe aujourd’hui entre la police du canton de Vaud (Suisse) et nos agents de la frontière, c’est à mon service de surveillance de la Haute-Savoie et notamment à M. Léal qu’en revient l’initiative.
Le département de police et de justice du canton de Vaud, en promettant de nous signaler et de réprimer lui-même avec énergie les menées anarchistes, avait pensé qu’il n’aurait à faire qu’à ceux-là même qui étaient entrés les premiers en pourparlers avec lui.
Or, il n’en est pas ainsi, les commissaires spéciaux de Morteau et de Pontarlier ayant pris l’habitude de demander les mêmes renseignements que notre commissaire d’Évian. Le président du département de justice et de police de Lausanne s’est ému du fait et a cru devoir en saisir M. le commissaire spécial d’Annemasse ; les visites réitérées des commissaires français sont une cause de dérangement, dit-il, pour les employés de son département qui sont ainsi détournés de leur travail et déconcertés par la quantité d’agents français venant leur demander les mêmes services. Ce haut fonctionnaire serait par suite bien aise qu’on ne lui fit pas payer aussi cher la complaisance dont il fait preuve et que notre commissaire spécial d’Évian, son plus proche voisin d’ailleurs, fût le seul qualifié pour entrer en rapport avec lui.
Il m’a paru, Monsieur le Ministre, que les susceptibilités du Président de la police du canton de Vaud avaient quelque raison d’être ménagées. J’ai donc l’honneur d’appeler tout particulièrement votre attention sur cette question que je serais heureux de voir réglée dans le sens indiqué plus haut.
Archives nationales 19940500/59