29 décembre 1934
La Fédération communiste libertaire, dissidente de « l’Union Anarchiste Révolutionnaire », a été fondée fin mai 1934 à la suite du « congrès d’unité » des anarchistes communistes qui s’est tenu à Paris les 20 et 21 mai dernier.
La scission des milieux anarchistes s’est produite à la suite de divergences de vues au point de vue nettement syndical des diverses tendances qui étaient représentées à ce congrès.
D’après les directives de la Fédération, les adhérents s’engagent à verser une cotisation mensuelle ; à œuvrer dans les syndicats en faveur de l’unité syndicale ; à travailler à la réalisation d’un front unique loyal entre toutes les organisations antifascistes, sans distinction de tendances et enfin à lutter de toutes leurs forces pour abattre le capitalisme et instaurer une société basée sur l’égalité économique.
La Fédération Communiste Libertaire (région parisienne) est composée du groupe de Paris, dont les réunions se tiennent habituellement au même lieu que celles de la Fédération, salle Lejeune, 67 rue de Ménilmontant ; du groupe de Pantin-Aubervilliers qui se réunit 16 rue du Vivier à Aubervilliers, du groupe de Clichy-Gennevilliers qui n’a pas de lieu de rendez-vous fixe, mais dont s’occupe activement le libertaire Le Bot Louis ; enfin du « groupe des Cuisiniers », récemment formé et dirigé par Léger Robert, jeune militant libertaire.
Elle a en outre envisagé la formation de nouveaux groupes, notamment à Paris (9e), à Clichy et à Saint-Denis, à Montmagny (Seine et Oise), à Narbonne (Aude), ainsi que dans le Midi et le Languedoc.
Actuellement, la Fédération Communiste Libertaire ne compte dans la région parisienne qu’une quarantaine de militants et ses effectifs en province seraient très réduits.
Jusqu’ici, les groupes et la Fédération n’ont fait preuve d’activité que par des conférences-causeries sur des sujets d’actualité, notamment « Le contrôle ouvrier », « les événements d’Espagne », etc. et par une balade champêtre organisée le 12 août 1934 à Méry-sur-Oise (Oise), au cours de laquelle des artistes des deux sexes du groupe « Floréal » ont prêté leur concours et dont les bénéfices a été versé au « Comité d’entraide aux emprisonnés politiques ».
Depuis le 4 août 1934, la Fédération Communiste Libertaire s’est livrée à une propagande dans toute la France par la distribution et le collage de papillons libellés comme suit :
« Fédération Communiste libertaire
La terre aux paysans – Les usines aux ouvriers – Soviets libres – Commune libertaire (Mouvement Maknoviste)
Fédération Communiste libertaire
Pas de lutte anti-guerre – Pas de lutte anti-fasciste – Sans lutte révolutionnaire – Contre le capitalisme.
Fédération Communiste libertaire
Le communisme libertaire – C’est la démocratie ouvrière – La production aux travailleurs – Le prolétariat armé – L’égalité des droits pour chaque prolétaire.
Fédération Communiste libertaire
Un seul capitalisme – Une seule classe ouvrière. Pourquoi trois CGT
Une guerre sans les travailleurs, c’est une ville sans briques. Contre la guerre. Refus massif de la mobilisation. Grève générale insurrectionnelle.
Seul, ce dernier tract ne porte pas de titre, mais on apprend de source sûre qu’il fut édité par la Fédération Communiste libertaire et que l’absence de tout titre avait pour but de soustraire cette dernière ainsi que ses militants à des poursuites éventuelles. Jusqu’à ce jour, aucune poursuite n’a été exercée à ce sujet dans le ressort de la Préfecture de Police.
En ce qui concerne les attentats individuels ou le recours à une insurrection révolutionnaire armée, ces théories sont à la base de la doctrine libertaire et ne manqueraient pas de toute évidence à être mises en application en cas de révolution.
Patat Charles, Arthur, Henri dit « Charles Revenut », né le 1er avril 1900 à Any-Martin-Rieux (Aisne) est marié, mais vit séparé de sa femme.
Il exerce la profession de cuisinier-confiseur.
Patat est domicilié 89 rue Saint-Fargeau à Paris.
Vieux militant communiste, il est passé en 1928 au mouvement anarchiste et alors qu’il appartenait au groupe de Saint-denis, il a été désigné comme membre de la Commission administrative au congrès de l’UACR qui s’est tenu à Amiens les 12, 13 et 14 août 1928.
En janvier 1929, il était membre de la Société coopérative de la « Librairie d’Etudes Sociales » et en 1934, permanent au journal Le Libertaire où il s’occupa de la besogne administrative. En outre, il a été remarqué parmi les libertaires le 28 juillet 1934 aux obsèques du militant russe Makhno alors qu’il vendait le journal La Patrie humaine. Par la suite, il a collaboré au journal Le Libertaire, sous le pseudonyme de « Charles Revenut ».
Patat est inscrit sur la liste des anarchistes de la Seine.
Il n’est pas noté aux Sommiers judiciaires.
Le Bot Louis, né le 2 mai 1908 à Gennevilliers (Seine) est marié et n’a pas d’enfant.
Il exerce la profession de monteur-électricien.
Depuis le 1er novembre 1934, il habite 6 rue de l’Arbre sec à Gennevilliers. Auparavant il demeurait chez ses parents domiciliés 1 rue Reflut à Clichy.
Alors qu’il résidait à Clichy, Le Bot a fait paraître plusieurs articles dans le journal Le Libertaire relatifs à la constitution d’un groupe anarchiste intercommunal groupant les localités de Clichy, Asnières et Gennevilliers.
Le 7 octobre 1930, il a été appréhendé pour apposition d’affiches à Clichy, annonçant un meeting en faveur des libertaires espagnols Pons et Blanco. Il a été relaxé après les vérifications d’usage et cette affaire n’a pas eu de suite judiciaire.
D’autre part, il a assisté en qualité de délégué du groupe anarchiste de Clichy au congrès de l’Union anarchiste qui s’est tenu à Orléans les 14, 15 et 16 juillet suivant et à l’issue duquel il a été désigné comme membre de la Commission administrative de l’UACR. Enfin, au congrès de la même organisation qui a eu lieu les 20 et 21 mai dernier, il a donné son adhésion à la La Fédération communiste libertaire.
Le Bot est inscrit sur la liste des anarchistes de la Seine.
Il n’est pas noté aux Sommiers judiciaires.
Léger Robert, né le 17 mars 1915 à Clermont-Ferrand, est célibataire.
Il est occupé en qualité de commis de cuisine au Buffet de la gare de l’Est.
Depuis un an, il est domicilié 98 rue d’Angoulême, au loyer annuel de 850 frs.
Léger qui, jusqu’à ces derniers temps, n’avait pas attiré l’attention, milite plus activement depuis la formation de la La Fédération communiste libertaire et s’occupe plus particulièrement du « groupe des cuisiniers » au sein de cette organisation.
Il n’est pas noté aux Sommiers des suites judiciaires.
Quant au nommé Bouffanais, Louis, âgé de 44 ans, marchand forain, qui résiderait à Tarbes, chemin de la Sendère, il avait tenté en en novembre 1924, alors qu’il demeurait dans cette dernière ville 86 rue de Pau, de former un nouveau groupe libertaire dans cette région ainsi qu’en fait foi un entrefilet du journal Le Libertaire du 30 novembre 1924.
Il n’a jamais été signalé dans la région parisienne.
Archives nationales 19940500/241