
Couverture du Néo-naturien
Préfecture de police
Direction générale des recherches
2e brigade
3e division
1er bureau
Réunion du groupe les Naturiens de Montmartre
Paris le 22 janvier 1896
Rapport
Hier soir a eu lieu, salle Bouju, 69 rue Blanche, une réunion du groupe Les Naturiens de Montmartre.
Huit personnes y assistèrent.
Il n’a pas été formé de bureau.
La séance est ouverte à 9 h 1/2.
Gravelle développe ses théories habituelles.
Il dit que les hommes qui aujourd’hui se font les serviteurs de la société, comme les balayeurs des rues, seraient plus heureux s’ils vivaient à l’état naturel.
Il ajoute que le blé et autres céréales ne sont pas indispensables à l’alimentation humaine et que si actuellement on les cultive d’une façon intensive, c’est parce que autrefois, des spéculateurs primitifs ont fait croire à leur utilité afin de vendre très cher celles qu’ils avaient accaparées.
Bigot parle dans le même sens et dit que c’est seulement l’irrégularité qui règne parmi les fortunes qui rend un gouvernement nécessaire.
Mayence se déclare libertaire. Il combat les théories naturiennes et préconise l’emploi des machines : « Nous avons le progrès, dit-il, il faut le conserver. »
Gravelle dit que le progrès ne serait utile que s’il devait donner à l’homme la plus grande somme de jouissance possible, ce qui n’est pas le cas selon lui.
Un assistant dont le nom n’est pas prononcé, fait connaître qu’un groupe de Ménilmontant va organiser une pétition pour demander la grâce d’un nommé Grangé, qui se trouverait actuellement au bagne, où il aurait été envoyé pour désertion et tentative de meurtre.
Cet assistant dit qu’il a chez lui le fils de Grangé.
La séance est levée à 11 heures 25.
Le commissaire de police.
Archives de la Préfecture de police Ba 1508
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