En-tête du numéro 1 du dimanche 12 septembre 1880. Éphéméride anarchiste.

Belgique

Je n’ai pas grandes nouvelles à vous envoyer de Belgique ; nous avons été vivement impressionné par la mort de Blanqui, et Mme Antoine a dû recevoir de Bruxelles un certain nombre d’adresses de sympathie ; les Cercles réunis viennent de faire paraître à ce sujet un placard qui raconte la vie de Blanqui : ce placard a obtenu un grand succès. En revanche, les élections qui ont lieu actuellement en France nous laissent absolument froids, nous savons d’avance que les bourgeois, les ventrus, les richards, les opportunistes l’emporteront, et nous nous bornons à déplorer qu’il y ait un aussi grand nombre de travailleurs qui se laissent prendre aux mensonges de la parade parlementaire.

Ici, nous commençons à être à peu près guéris de cette maladie suffrage universelleuse ; je n’en veux citer pour exemple que la tendance de plus en plus marquée de tous les groupes en Belgique à s’occuper de plus en plus exclusivement de l’organisation des forces révolutionnaires.

Un certain nombre de groupes ont déjà nommé leurs délégués au nouveau bureau fédéral, et une première réunion de ce bureau a eu lieu samedi.

Du reste il se produit en ce moment, en Belgique, un mouvement que n’arrêteront ni les déclamations idiotes de quelques réactionnaires affolés, ni les expulsions réitérées de socialistes étrangers, auxquels le gouvernement libéral que l’Europe ne nous envie pas, semble prendre un plaisir tout particulier.

Il n’est pas jusqu’à la jeunesse universitaire qui ne semble quelque peu décidée à sortir de son lon sommeil ; on commence à trouver quelques étudiants qui ne craignent pas de se dire révolutionnaires.

Je vous ai déjà signalé l’apparition de l’Etudiant socialiste ; une autre revue naissante vient de publier un article intitulé Minutes perdues d’un clerc de notaire, qui ne manque ni de gaieté, ni de radicalisme, ni même d’esprit.

On y dit que le poète dont on parle aimait à dire de dures vérités aux prêtres et aux bourgeois, que les rois dans ses vers, coudoyaient les cocus ; ses deux runes favorites étaient cuistre et ministre, etc.

J’insiste un peu sur ce sujet ; mais c’est que j’ai toujours suivi avec un grand intérêt les mouvements de la jeunesse iniversitaire ; c’est que, contrairement à l’opinion de plusieurs de mes amis, j’ai toujours pensé que le triomphe du parti socialiste révolutionnaire viendrait d’une alliance nécessaire entre les travailleurs et les déclassés de la bourgeoisie amnistiés par le peuple.

Vonck (Arsène Crié)

PS. La Voix de l’ouvrier raconte gravement à ses lecteurs que, dans le meeting donné à Cuesmes, le compagnon Fabien Gérard a été très applaudi en terminant le meeting ; malheureusement, le compagnon Gérard n’a parlé qu’au commencement de la réunion.

Ce seul fait suffit pour apprécier la bonne foi du journal que mon ami Reivax (Xavier Stuyck) appelle avec raison la Voix de la Discorde.

V.

La Révolution sociale n°5 16 janvier 1881

Lire le dossier : Les anarchistes en Belgique avant les émeutes de 1886