
Année 1884
18 février 1884 : Meeting anar-socialiste, salle de Venise.
Orateurs : Jules Guesde et Bernstein
Président d’honneur : Cyvoct
Président : Démure
Assesseurs : Chollet et Etienne (?)
14 mars 1884 : Collage d’affiches anarchistes manuscrites
18 ou 19 mars 1884 : Anniversaire de la Commune par les anars et socialistes chez Deshomière, cafetier, rue Saint-Jean. Des discours sont prononcés par : Calais, Delorme, Frobert (?) (socialiste) et Barret (anar). Le banquet se termine par une manifestation de rue avec drapeau rouge et chants révolutionnaires, le cortège passe rue Saint-Jean, Hôtel de ville et se dissout au carrefour Helvétique.
23 mars 1884 : Réunion salle de Venise anar et socialiste.
Orateurs : Muie (?) et Fouillard (socialistes), Charasse et Grand (anarchistes) ;
Président : Grand (anarchiste)
Assesseurs : Epmar (?), Russier, Mure (socialistes)
Sujet traité : salaires et heures de travail.
12 avril 1884 : Suite de la manifestation du 18 mars, 5 condamnations sont prononcées contre Calais et Delorme (socialistes), Réal, Démure, Delorme (anarchistes) allant de 15 F d’amende à 5 jours de prison et 1F d’amende.
12 mai 1884 : Le rapport de police de ce jour annonce 100 anarchistes fichés à Roanne (chiffres grossis par le commissaire). Les noms ne sont d’ailleurs pas cités et pour cause.
Juin 1884 : Lettre du groupe « Le Revolver » de Roanne au journal marseillais « L’Affamé » pour soutien et promesse d’aide.
15 juillet 1884 : Réunion du groupe « Le Révolté », 10 présents dont un compagnon stéphanois.
Août 1884 : Perquisitions domiciliaires chez les militants anars, découverte d’une cartouche de dynamite chez Jarroux, d’une bombe chargée et d’autres non chargées chez Etienne E., d’un cahier de notes sur la fabrication de la dynamite chez Charasse père et fils.
16 octobre 1884 : Attentat à la dynamite contre la prison de Roanne (peu de dégâts)
16 octobre 1884 : Lagrue (garçon boulanger) et anarchiste est arrêté, soupçonné d’être l’auteur de l’attentat contre la prison.
P. Grand est également arrêté pour le même motif.
16 octobre 1884 : Une statistique policière dressée à la suite de l’attentat annonce 300 anarchistes à Roanne. Ce chiffre est naturellement grossi par le commissaire dans le but de renforcer les effectifs de police dans la ville.
17 octobre 1884 : Suite à l’attentat contre la prison, arrestation de :
- Joly Valentin : manœuvre, terrassier
- Réal Jean-Baptiste : ancien réclusionnaire de 5 ans pour vol et en 1876 pour pose de placards séditieux à 4 ans de prison.
- Charasse (père) ancien bibliothécaire populaire de la ville de Roanne et tisseur.
- Charasse fils : teinturier (gagnant 3, 50 F par jour)
- Desmure J.C. : président du groupe « Le Revolver » (selon le rapport)
- Dumas et Lambert, également membres du groupe « Le Révolver » qui comprendrait selon le rapport 20 membres. Il y a là une confusion très probable entre le groupe fictif « Le Revolver » monté en épingle pour les besoins de l’accusation et le groupe réel « Le Révolté »
octobre 1884 : attentat à l’aide d’une cartouche de dynamite entre la Poste, le café Helvétique.*
17 octobre 1884 : La statistique de police de ce jour annonce :
- E. Etienne : 28 ans, tisseur
- Janoux G. : 35 ans, serrurier
- Réal J. B. : 46 ans, écrivain public, ancien tisseur
- Lambert G. (ou E?) : 26 ans, charpentier
- Joly Jean : 32 ans, fonseur
- Desmure J.C : 29 ans, tisseur, 3 condamnation pour délits de presse et chez qui les réunions anar ont lieu chaque semaine.
- Charasse F. : 54 ans, tisseur
- Charasse (fils) : 18 ans, teinturier
- Dumas V. : 36 ans, tisseur, connu comme anarchiste dangereux par l’autorité.
- Marquet Benoit : 42 ans mécanicien
Octobre 1884 : Un autre rapport aussi mauvais, annonce encore 129 anarchistes en ville se répartissant en 3 groupes : « Le Revolver », « Le Poignard », « La Jeunesse révolutionnaire ». Les réunions se tiendraient selon ce rapport au n°13 de la rue des Moulins. Aucun document ne permet de penser que ces groupes existent réellement en 1884, si ce n’est le « Revolver » qui regroupe comme nous l’avons signalé des militants révolutionnaires de tous bords depuis 1882, mais qui n’a pas d’activité.
17 octobre 1884 : D’autres arrestations sont opérées en ville contre Grellot Claudius, Marquet (mécanicien), Etienne E., 24 ans tisseur, Jarroux (mécanicien).
- Grillot Claudius est un compagnon lyonnais en visite chez des anars de Roanne, lors des attentats de ce mois
- Marquet est un compagnon de Villefranche-sur-Saône qui correspond avec E. Etienne couramment et se trouvait chez celui-ci au moment de son arrestation. Il anime à Villefranche le groupe ‘Le Glaive » et on a saisi chez lui une lettre et un manuel pour la fabrication des explosifs, écrits pour E. Etienne.
12 décembre 1884 : E. Etienne est condamné à suite de la saisie chez lui en août 1884 de dynamite à 3 ans de prison ferme. Jarroux à 10 mois pour le même motif, Marquet est acquitté.
Source : Médiathèque de Roanne 23 F 64 n°21
A suivre.
Consulter la biographie de Lucien Grelaud
Lire le dossier : Les anarchistes de Roanne (Loire)
Note d’Archives anarchistes :
Dans ses commentaires, Lucien Grelaud a tendance à minimiser le nombre d’anarchistes à Roanne en expliquant que les chiffres de la police sont grossis volontairement pour obtenir des effectifs supplémentaires au commissariat. C’est un argument souvent avancé mais qui n’est pas complètement recevable. En effet, il pouvait être risqué de donner des chiffres grossis à la hiérarchie, car c’était aussi courir le risque de devoir justifier ces chiffres en donnant des noms et donc de devoir augmenter une « paperasserie » administrative déjà bien lourde.
Les chiffres avancés par la police 300, puis 129, sont très probablement ceux des sympathisants et pas des militants, ce qui peut expliquer leur grande variation (à la « louche ») selon le contexte du moment. Il suffisait probablement que le commissaire assiste à une réunion avec 130 ou 300 personnes pour affirmer qu’il avait 130 ou 300 anarchistes à Roanne.
L’argument du grossissement des chiffres a pu certes jouer dans certains commissariats mais sans avoir l’ampleur évoquée.
On peut expliquer cette tendance à minimiser le nombre d’anarchistes chez les historiens des années 1950 et 1960, par le contexte historique de l’époque, avec un parti communiste surpuissant et des anarchistes très minoritaires. Il leur était difficile d’imaginer un courant anarchiste, sinon hégémonique, ce qui n’était pas le cas, mais capable de concurrencer les autres courants socialistes (guesdistes ou possibilistes à Roanne).
Lucien Grelaud pensait également que le groupe « Le Révolver » était une fiction mais sans donner de véritables documents justifiant cette affirmation. Pourtant l’emploi de ce type de nom était une pratique courant de l’époque, encore plus justifiée à Roanne avec l’affaire Fournier et bien d’autres groupes avaient ce genre de qualificatif (ex Le Glaive). Mais ce nom semble totalement incongru dans les années 50-60.
*Cet attentat a eu lieu le 4 août 1883 : Explosions au café Helvétique et à l’usine Chabrier de Roanne. 4 août 1883