Document Archives de l’autonomie.

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Le 6 octobre 1917

Le lundi 24 septembre, Mauricius était avisé que Sébastien Faure avait été arrêté la veille. Genold avisé en même temps que Mauricius et Trivier par un journaliste, s’était rendu ce même jour à CQFD, où Einfalt l’avisa que Sébastien Faure était venu le matin prendre l’argent en caisse et l’argent de la vente quotidienne des brochures (environ 600 francs en tout).

Sébastien Faure avait déclaré avoir besoin d’une grosse somme, le soir du même jour, le même journaliste prétendit devant quelques personnes que la Préfecture de police confirmait l’arrestation de Sébastien Faure, et qu’au ministère de l’intérieur on ajoutait qu’il s’agissait d’attentat aux mœurs.

Le mardi 25, Mauricius, Genold et Trivier se rendirent le matin à CQFD où Sébastien Faure devait être comme à l’ordinaire pour remettre la copie du journal, Sébastien Faure était parti sans les attendre rue Pixécourt. Genold et Trivier y furent mais Sébastien Faure était déjà parti après avoir là aussi enlevé l’argent.

Le mercredi 26, Sébastien Faure avisait Einfalt par pneu, qu’il était obligé de partir à la Ruche.

Le jeudi 27, Mauricius recevait de Rambouillet, une lettre dans laquelle Sébastien Faure disait ne pouvoir se rendre à l’imprimerie pour la mise en pages et que pour les affaires d’argent sur lesquelles Mauricius lui avait demandé des renseignements précis, il reviendrait sous peu s’en entretenir avec lui.

Depuis le silence le plus absolu. Pendant ce temps le bruit de l’arrestation pour histoire de mœurs courait dans le monde politique et journalistique ; bruit qui allait grossissant.

Le lundi 1er octobre une lettre de Sébastien Faure datée de Bordeaux, arrivait à la Fraternelle et disait qu’une rechute de maladie avait nécessité son départ dans le midi.

Le mercredi 3 octobre au soir, une lettre parvint à Trivier avec un article pour CQFD, la lettre datée de Bordeaux, annonçait simplement une autre missive qui arriva le 5 octobre.

Dans cette dernière, Sébastien Faure expliquait à Trivier, Genold et Mauricius les faits suivants :

« Le mardi 25, dit Sébastien Faure, un ami franc-maçon, personnage important vint me prévenir qu’à la suite de la conférence faite par moi à la CGT, malgré l’interdiction de la police, le conseil des ministres avait décidé de m’arrêter avec tous mes amis. Cet ami me presse vivement de fuir, et devant mes hésitations, il argue que mon départ sauverait mes camarades, le gouvernement ne pouvant arrêter mes collaborateurs alors que j’étais en fuite et qu’on pouvait l’accuser d’avoir facilité mon départ. Cet argument l’emporta, je décidai de m’en aller. J’espère que l’orage passera sans crever et que je reviendrai bientôt parmi vous. »

Le soir du même jour Mauricius recevait une autre lettre dans laquelle Sébastien Faure disait : « Tu sais dans quelles circonstances j’ai dû m’absenter, j’espère que ce ne sera pas pour longtemps, je compte sur toi pour assurer le journal, j’enverrai mon article chaque semaine. »

Puis suivait des comptes extrêmement embrouillés et des déclarations de désintéressement et de foi dans la propagande.

Cette lettre comme les précédentes venait de Bordeaux.

Mauricius de son côté demandait dans la petite correspondance de CQFD, sous le pseudonyme Jean Louis, une adresse à Sébastien Faure.

Voilà la genèse de l’affaire.

Cette affaire en soi n’a qu’une importance relative mais ses conséquences peuvent être graves.

Mauricius a des griefs contre Sébastien Faure. Il a acquis la preuve que celui-ci puisait dans la caisse sans compter et sans tenir de comptes. S’il peut avoir la certitude que l’histoire de l’arrestation est un bluff monté de toutes pièces pour masquer la véritable histoire de mœurs que Sébastien Faure cherche à cacher, Mauricius n’hésitera pas à profiter de la situation et à prendre sa revanche de juin 1916, où Sébastien Faure a accaparé le journal pour lui seul. Il le sommera de quitter immédiatement CQFD et toute propagande active, sous peine de révéler au grand jour comment Sébastien Faure prenait l’argent de la propagande pour satisfaire ses sales passions.

Archives de la Préfecture de police Ba 1660

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