Préfecture de police

Direction générale des recherches

2e brigade

Cabinet 1er bureau

Réunion des Naturiens 69 rue Blanche

Paris 17 juillet 1895

Hier soir a eu lieu la réunion du groupe dit Les Naturiens, 69 rue Blanche à 9h ½

L’assistance se composait de 10 personnes.

Gravelle a traité de la vie à l’état naturel.

Pour lui, l’homme peut très bien vivre sans le progrès actuel de la civilisation ; chaque individu a en France 1200 mètres carrés de terre, avec cela il peut vivre sans aucun travail ; mais toutefois pour arriver là, il faut renverser l’œuvre existante, par une révolution qui permettrait de prendre à celui qui a trop, pour donner à ceux qui n’ont rien ou pas assez.

L’état naturel, à mon point de vue, dit-il, ne peut plus être ce qu’il était il y a 2.000 ans. Il n’y avait alors que quelques tribus, mais, ces tribus étant, mais ces tribus étant devenues plus nombreuses, il s’est rencontré des individus qui ont trouvé que sans le travail artificiel, ils ne pourraient vivre.Ils se sont alors mis à travailler la terre et d’autres individus, par leur astuce se sont imposés aux autres, sont devenus chefs ; ils ont eu des imitateurs, on est arrivé ainsi à l’état naturel. Ce qu’il nous faut, c’est un état libertaire, où chacun peut faire ce qui lui plait.

Un assistant prend la parole, pour demander à Gravelle de lui expliquer, s’il veut faire de lui un adepte de ses doctrines, ce que veut dire ce mot « naturel » parce qu’aujourd’hui, on ne conçoit plus ce mot, que, pour lui, on ne peut pas détruire le progrès existant.

A partir de ce moment, s’engage une discussion sans suite à laquelle il est impossible de rien comprendre, tous les assistants se mettant à parler ensemble, chacun voulant faire prévaloir son opinion.

La séance est levée à 11h15.

Le commissaire de police.

Source : Archives de la Préfecture de police Ba 1508

Lire le dossier Les Naturiens, des anarchistes précurseurs de l’écologie politique