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Archives Mensuelles: juillet 2016

Les perquisitions chez les anarchistes de l’Aube le 21 novembre 1893 : un coup pour rien.

23 samedi Juil 2016

Posted by fortunehenry2 in Analyse

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Une série de perquisitions est lancée ce 21 novembre 1893 chez des anarchistes de l’Aube : Louis Morperrin, Charles Lécorcher, Ernest Pannetier, Paul Martinet ,  Gilbert Panas, (absent de chez lui ce jour-là, sa porte est ouverte par un menuisier requis par le juge d’instruction).

Comment expliquer un tel déploiement de force, des visites domiciliaires au petit matin dans le but de rechercher des « matières explosibles » ?

C’est que dans la nuit du 15 au 16 novembre, à minuit, une explosion se produisait rue Armeny, devant l’hôtel de la division du 15e corps d’armée à Marseille.

Une boîte de fer-blanc, d’environ trente centimètres, avait été placée dans la guérite creusée dans la muraille même de l’immeuble, attenante à la salle où se réunissent les plantons du général.

L’explosion a été si violente que la mur s’est lézardé du haut en bas. Dans la salle des gardes, tout a été détruit. Les vitres et les glaces ont volé en éclat dans la maison et les immeubles qui l’avoisinent.

Il n’y eut aucune victime. Un soldat qui était couché dans la salle des gardes, sur le lit de camp, n’eût même pas une égratignure.

A la suite de cet attentats des consignes sont adressées aux préfets par la ministre de l’intérieur, de faire procéder à des perquisitions dans un grand nombre de départements pour y rechercher des explosifs. La plus grande discrétion est exigée afin que l’opération ne soit pas ébruitée et perde donc de son efficacité.

Le préfet de l’Aube, demande, le 20 novembre, au procureur de procéder aux perquisitions dès le lendemain, reprenant au passage les consignes ministérielles : « Je vous recommande de procéder à ces mesures avec la plus grande discrétion, de façon à ce qu’elles n’aient pas d’autre publicité que celle qui doit nécessairement résulter de leur exécution ».

Le juge d’instruction délivre le jour-même trois commissions rogatoires transmises aussitôt au commissaire central et se conserve la perquisition chez Paul Martinet, considéré certainement comme le militant le plus en vue et demeurant à Sainte-Savine, Gilbert Panas habitant la même commune, le juge prévoit d’y aller ensuite.

Comme pour marquer l’importance de l’affaire, le procureur accompagne le juge d’instruction.

Toute cette escouade (juge, greffier, procureur, commissaires, agents) débarque chez les anarchistes au petit matin, fouille de la cave au grenier mais ne trouve pas la moindre trace de dynamite.

Mais les consignes de la Préfecture recommandaient aussi de saisir les « papiers et correspondances se rapportant ou se rattachant à des projets d’attentats », le juge repris cette extension de la recherche dans ses commissions rogatoires et dès lors tous les documents se rapportant à l’anarchie furent saisis : journaux, brochures, lettres.

Après lecture attentive dans le calme de son cabinet, le juge d’instruction ne trouva aucun écrit se rattachant à un projet d’attentat. La chanson « La dynamite » ne fut probablement considérée que comme une œuvre littéraire.

Dès lors, il ne lui restait plus qu’à délivrer un non-lieu, ce qu’il fit le 22 novembre 1893.

L’affaire avait été rondement menée !

Le Père Peinard donna son point de vue sur ces perquisitions pour rien : « Y a pas mèche de raconter par le menu tous les perquisitionnements qu’il y eu : y en a eu dans tous les patelins des Ardennes, à Lille, Troyes, Orléans, Lyon, Saint-Etienne, Saint-Chamond, Montceau les Mines, etc, etc.

Partout grand fiasco, nom de dieu !« ( 3 décembre 1893)

Si le juge ne trouva rien, il reste dans le dossier quelques pépites : des courriers particulièrement intéressants comme ceux de Sébastien Faure, le conférencier le plus populaire chez les anarchistes qui explique dans une lettre que face à la répression dont le mouvement est la victime (il est lui même en prison),  « ce qui fait notre force, c’est précisément ce qu’ils appellent « eux » notre absence d’organisation, parce qu’ils ne conçoivent pas d’organisation sans maîtres, sans chefs, sans comité, sans direction unique »… « Si nous avions comme les autres partis un Comité directeur, ou des comités nationaux, régionaux ou locaux, la répression serait facile et efficace ». Un document qui coupe court à de nombreuses discussions sur la nature du mouvement anarchiste : il n’y a pas de comité directeur qui téléguiderait les actions.

Une autre lettre de Faure montre les difficultés pour organiser les conférences, le temps passé à mettre sur pied chacune d’elles, la question de se faire remplacer ou pas, toute une petite cuisine interne dont il serait difficile de se douter sans avoir lu ce document. On y comprend l’importance de ces correspondants locaux pour S. Faure, correspondants que l’on retrouve dans des listes qui furent saisies à divers moments sur Faure et qui firent l’objet de nombreux enquêtes policières que l’on retrouve dans un carton des Archives nationales (F/7/12506). La police devait penser qu’il s’agissait de listes de dangereux correspondants prêts à déposer des bombes, alors qu’il s’agissait de militants locaux chargés de retenir des salles et de coller des affiches.

Autre courrier particulièrement intéressant, cette lettre d’Octave Jahn, un des militants anarchistes les plus en vue et dont la vie fut un vrai roman d’aventure. Le militant exprime ouvertement son état d’esprit à un compagnon et ami.

Deux courriers montrent comment les compagnons procédaient pour financer certains projets que ce soit une imprimerie ou la création d’un journal : ils envoyaient une circulaire avec des listes de souscription à faire circuler. Point n’était besoin de passer par une organisation nationale structurée, les initiatives étaient décentralisées et horizontales.

Enfin dans tous les documents saisis, une brochure « Aux affamés » publiée en 1887, dont il est fort possible que ce soit le seul exemplaire conservé.

Une nouvelle preuve, si besoin en est que les dossiers de justice constituent une photographie à un instant T de l’histoire du mouvement anarchiste et qu’ils sont souvent une source de documents de première main donnant le point de vue des militants, bien loin des rapports de police, rédigés par des indicateurs motivés uniquement par l’appât du gain.

Ordonnance de non lieu le 22 novembre 1893, suite aux perquisitions chez les anarchistes de l’Aube

22 vendredi Juil 2016

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Ordonnance de non lieu

Nous, Janvier de la Motte, juge d’instruction au tribunal de première instance de l’arrondissement de Troyes,
Vu la procédure instruite contre X
Inculpé de détention de matières explosibles.
Vu le réquisitoire de M. Le procureur de la république.
Attendu qu’il n’est résulté contre qui que ce soit charges suffisantes d’avoir commis les crimes et délits qui font l’objet de l’inculpation.
Vu l’art. 128 du Code d’instruction criminelle,
Déclarons n’y avoir lieu à poursuivre,
Et ordonnons le dépôt de la procédure au greffe pour qu’elle soit reprise en cas de survenance de nouvelles charges.
Fait à mon cabinet, à Troyes, le 22 novembre 1893

AD de l’Aube 5 U 268

Perquisition chez Gilbert Panas à Ste Savine le 21 novembre 1893

22 vendredi Juil 2016

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21 novembre 1893
Procès-verbal de perquisition au domicile du sieur Panas

L’an mil huit cent quatre vingt treize, le vingt huit novembre à sept heures et demie du matin.
Nous, Janvier de la Motte, juge d’instruction de l’arrondissement de Troyes, accompagné de M. le procureur de la république, assisté de M. Hannion notre greffier, nous sommes transportés à Ste Savine, rue de l’Indépendance, n°22, au domicile du sieur Panas Gilbert, à l’effet d’y opérer une perquisition.
A notre arrivée nous avons trouvé fermée à clef, la porte de la maison habitée par Panas. Une voisine nous fait connaître que ce dernier est absent de chez lui depuis quinze jours et qu’on ne sait pas quand il rentrera.
Nous requérons le sieur Guérin, menuisier à Ste Savine, à l’effet d’ouvrir la porte de la maison. Cette porte ouverte, nous avons trouvé toutes celles intérieures non fermées à clef.
Nous avons saisi :
1° un certain nombre d’exemplaires du journal « La Révolte »
2° un n° du « Père Peinard »
3° une affiche intitulée « Le père Peinard au populo »
Et nous avons ensuite requis le sieur Guérin, menuisier, de refermer la porte de la maison.
Nous avons dressé le présent procès verbal pour être joint à la procédure.

AD de l’Aube 5 U 268

Circulaire du groupe d’Avignon pour l’achat de matériel d’imprimerie 12 octobre 1891

22 vendredi Juil 2016

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Avignon le 12 octobre 1891

Chers compagnons

Le groupe anarchiste d’Avignon, se voyant dans l’impossibilité d’organiser des conférences, par suite de l’obstruction bourgeoise, qui a accaparé toutes les salles de réunion et voulant quand même étendre la propagande, a décidé de profiter de l’offre que lui a fait un camarade qui possède une partie d’un matériel d’imprimerie.
A cet effet nous avons organisé une grande tombola avec 18 lots d’une valeur de 211 francs et dont le bénéfice sera versé au profit du matériel qui reste à acheter.
Il y a 425 numéros à 0,50 le numéro.
Nous faisons appel à votre solidarité afin que vous fassiez circuler la liste ci-inclus et nous la retourner le plus vite possible.
Les camarades qui souscriront prendrons les n° qui leur plaira depuis le n°11 jusqu’à 320 (Les autres numéros sont déjà pris).
Nous comptons sur vous comme vous pouvez compter sur nous dans pareille circonstance.
Tout à vous et à la sociale !

Pour le groupe
J. Chabrol
Adresser lettre et mandats à J. Chabrol au kiosque Montoyard Place du portail Matheron. Avignon. Vaucluse.

AD de l’Aube 5 U 268

Perquisition chez Paul Martinet, bonnetier à Ste Savine (Aube) le 21 novembre 1893

Circulaire de la Ligue des Anti-patriotes pour la parution d’un journal

22 vendredi Juil 2016

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Paris le 23 juin 1891

Compagnons,
Le patriotisme décline de jour en jour entraînant dans sa chute le militarisme, cette incarnation facile de toutes les ignominies. Les difficultés que nous rencontrons dans cette lutte n’ont de valeur qu’en raison de la médiocrité de nos moyens, c’est donc à la perfection de ces derniers que nous devons nous attacher plus spécialement à ce point de vue le journal s’offre de (illisible) à nos regards car en effet c’est là un des plus puissants moyen de propagande. La bourgeoisie l’a fort bien compris aussi en use-t-elle avec une dextérité remarquable.
Si nous sentons l’importance de ce moyen et que nous nous pénétrions de son utilité, nous pourrons avec peu d’efforts le mettre à notre disposition. Nous croyons qu’en ce moment ce journal serait d’une grande utilité pour l’idée ; aussi comptons nous sur l’aide de tous les camarades pour qu’il ne soit pas d’une apparition éphémère.
Fait sur une base absolument libre, étant l’œuvre de tous, il aura besoin de la collaboration de tous et devra être accessible à tous, telle est la base sur laquelle nous nous attachons à faire cet organe.
Espérant que vous apprécierez les services efficaces que pourra rendre ce journal, nous comptons sur votre concours pour mener cette œuvre à bonne fin.
Nous joignons à cette lettre une liste de souscription que nous vous prions de faire circuler le plus rapidement possible en vous faisant remarquer que le premier numéro paru, il vous sera envoyé un nombre d’exemplaires correspondant à la somme souscrite sur votre liste que vous vous chargerez de répartir parmi les souscripteurs pour en faire l’usage qu’ils jugeront nécessaire pour la propagande.
Tout à vous et à la cause.
La Ligue des antipatriotes

Envoyer fonds et communications au compagnon Louis Perrault 5 rue des Panoyaux Paris XXe arrondissement

AD de l’Aube 5 U 268

Perquisition chez Paul Martinet, bonnetier à Ste Savine (Aube) le 21 novembre 1893

Le projet de journal évoqué dans cette circulaire aboutit peu après avec la parution de l’Anti-patriote dont le n°1 parut le 12 juillet 1891

Perquisition chez Paul Martinet, bonnetier à Ste Savine (Aube) le 21 novembre 1893

22 vendredi Juil 2016

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21 novembre 1893

Procès-verbal de perquisition au domicile du nommé Martinet

L’an mil huit cent quatre vingt treize, le vingt et un novembre, à six heures et demi du matin.
Nous janvier de la Motte, juge d’instruction de l’arrondissement de Troyes, accompagné de M. le procureur de la république, assisté de M Haminard, notre greffier, nous sommes transporté à Ste Savine, rue de l’Ecole normale, 13, au domicile du sieur Martinet Marie Paul Ange, bonnetier, à l’effet d’y opérer une perquisition.
Nous avons saisi, en présence de Martinet
1° un certain nombre d’exemplaires du Père Peinard ;
2° un certain nombre d’exemplaires du journal La Révolte
3° une lettre datée du 23 juin 1891 de la Ligue des antipatriotes
4° une lettre du 12 octobre 1891, signée Chabrol
5° une carte lettre du 17 octobre 1891, adressée par le rédacteur du journal L’Endehors
6° une lettre du 20 octobre signée Delhaye
7° une note écrite au crayon, intitulée « aux petits commençants »
Et nous avons dressé le présent procès-verbal pour être joint aux pièces de la procédure.

AD de l’Aube 5 U 268

Le préfet lance les perquisitions chez des anarchistes de l’Aube le 20 novembre 1893

22 vendredi Juil 2016

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Cabinet du préfet de l’Aube

Troyes le 20 novembre 1893

Monsieur le Procureur de la république,

J’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien faire procéder demain matin à la première heure à la perquisition au domicile des anarchistes habitant la ville de Troyes, et chez lesquels pourraient se trouver des matières explosibles, des instruments ou produits servant à leur fabrication, ou des papiers et correspondances se rapportant ou se rattachant à des projets d’attentats.
Je vous recommande de procéder à ces mesures avec la plus grande discrétion, de façon à ce qu’elles n’aient pas d’autre publicité que celle qui doit nécessairement résulter de leur exécution.
Agréez, Monsieur le procureur de la république, l’assurance de ma considération la plus distinguée.

Le préfet de l’Aube

AD de l’Aube 5 U 268

Perquisition chez Pannetier Ernest Isidore, jardinier demeurant rue de l’Eau Bénite, n°6 à Troyes.

Perquisition chez Lécorcher Charles, 47 ans, métreur à Troyes

« Aux affamés » publication de l’Union des groupes anarchistes des XIIe, XXe arrondissements et de Montreuil-Vincennes 1887

21 jeudi Juil 2016

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Lettre de Sébastien Faure de la prison de Clairvaux à Pannetier de Troyes

21 jeudi Juil 2016

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Clairvaux le 24 octobre 1893

Mon cher Pannetier,

Je n’ai que peu de choses à te répondre :

1° Je n’ai dit à personne que je voulais faire une conférence le soir même de ma sortie.

2° Je n’ai pas dit davantage que j’avais l’intention de la faire à Troyes.

3° Le 11 n’est pas le jour de ma sortie, puisque je suis libéré le 6.

Voilà donc un premier motif qui ne tient pas debout.

2e point. Je t’ai écrit le 6 septembre (2 mois avant la date de ma libération) pour te dire d’attendre ma sortie pour nous entendre sur la conférence que les camarades troyens projetaient. Et tu viens me dire aujourd’hui que je t’ai averti trop tard et que vous ne pouviez reculer ? (illisible), mes amis ! Il me faut plus de 2 mois pour organiser une réunion ou en fixer la date ?

3ème point. Tu ajoutes que vous ne voulez pas m’obliger à faire une conférence malgré moi. Je n’ai pas de peine à la croire, car je me demande quels moyens vous auriez, pour me contraindre (matériellement du moins) à faire ce que je ne voudrais pas. Vous êtes donc bien aimables de respecter ainsi ma liberté. Merci.

4ème point. Je n’ai jamais envoyé personne à ma place lorsque j’ai pris l’engagement de me rendre quelque part, pas plus à Troyes qu’ailleurs. Je me rappelle fort bien ce qui s’est passé lorsque Weil et Martinet (la 1ère fois) se rendirent à Troyes. Je n’avais rien promis : j’avais au contraire fait prévenir que je ne pourrais pas y aller moi-même, mais il avait été convenu que, dans ce cas, je me ferais remplacer. Tout était donc parfaitement entendu entre nous. Est-ce la même chose cette fois-ci ?

Mon cher, sache que je ne m’emballe pas du tout. Je suis simplement fatigué de l’abus que l’on fait de mon nom, non seulement à Troyes, mais dans plusieurs autres villes. Il fut un temps où on se servait ainsi du nom de Louise Michel et j’ai pu voir l’effet déplorable qui en résultait. C’est un petit jeu auquel je suis et entends rester libre de ne pas me prêter. Voilà tout.

Quant à l’éclat dont tu parles, je me demande en quoi il pourrait être nuisible à la propagande que le public fut informé que je ne puis, en raison d’un empêchement majeur, me rendre à Troyes le 11 novembre ?

Tu me permettras de te dire que, sur ce point, ce sont les compagnons de Troyes qui s’emballent à propos de lettres (?).

Je termine en te disant que,s’il est vrai que je me suis fait remplacer deux fois et que le public eût entendu un autre compagnon, alors qu’il m’attendait, c’est précisément une raison (et peut-être la meilleure) pour qu’on en fasse pas autant une 3ème fois. Qu’en dis-tu ?

Je te serre la main.

Sébastien Faure

Perquisition chez Pannetier Ernest Isidore, jardinier demeurant rue de l’Eau Bénite, n°6 à Troyes.

AD Aube 5 U 268

Lettre d’Octave Jahn à Pannetier de Troyes le 20 mai 1890

21 jeudi Juil 2016

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Paris 20 mai 1890
Cher compagnon et ami

Peu de temps après t’avoir écrit, j’avais appris la nouvelle peu rassurante de ton arrestation et certes, lorsque j’ai reçu ta réponse, j’ai éprouvé une surprise qui n’avait d’égale que ma satisfaction.
Mes compliments les plus sincères à tous les compagnons troyens car la Révolte m’a appris que là-bas l’énergie n’est pas aussi masturbée qu’à Paris. Ici les groupes ne comptent pour ainsi dire plus, l’on se réuni pour trinquer ensemble, dire du mal de Pierre ou de Paul, critiquer telle ou telle action, ect, ect… un gâchis complet.
Avec cela la solidarité et la confiance n’existent plus, des sales types, pleins d’appétits et de vices bourgeois se sont faufilés – et ils n’avaient pas de peine ! – dans les groupes anarchistes, cherchant sous notre bannière de liberté un abri à l’ombre de du quel ils satisfont leurs sales caprices de fainéantise et de débauche.
Libre à eux d’être fainéants et débauchés ! Mais que les anarchistes ne soient pas assez naïfs pour entretenir leur paresse et leur décadence morale en les laissant vivre en parasites sur les groupes, en leur confiant des sommes d’argent – leur servant de jouet après tout.
Je suis frac avec toi afin que les camarades de province sachent que plus que jamais les convaincus, ceux qui ont à cœur le triomphe de nos idées se fixent bien dans la pensée qu’il y a à travailler dur et ferme sans se décourager si les résultats ne donnent pas la satisfaction que les efforts qu’on a fait faisaient espérer.
« Tu pourras bientôt jouir des bienfaits de la société future » me dis-tu dans ta lettre, non cher compagnon, pas plus que toi je n’en jouirai ; si nous survivons à la révolution qui est certainement prochaine – nous jouirons certes de grandes améliorations mais nous aurons encore à lutter, à combattre : notre œuvre n’est pas seulement matérielle (la révolution) elle est aussi intellectuelle (l’évolution des cerveaux).
Mais ce dont nous jouirons, ce dont nous jouissons c’est d’un bonheur anticipé, bien plus grand que le bonheur même – car tu sais que l’appréhension du plaisir surpasse toujours ce dernier – et ce bonheur anticipé nous le trouvons, nous l’aurons dans la satisfaction d’avoir fait notre devoir, c’est à dire d’avoir répondu au besoin de justice que nous sentons en nous-même.
Enchanté que les jeunes arrivent, c’est dans la jeunesse qu’est l’espoir, elle seule à la foi, la lutte et ses déboires ne l’ont pas encore rendue sceptique… découragée !
Je suis actuellement chez le compagnon Duprat qui est restaurateur, je profiterai donc de cela pour me remettre un peu physiquement et je resterai encore à Paris un ou deux mois mais guère plus. Alors je passerai par Troyes. Si cependant avant ce délai vous aviez besoin de mon concours pour une réunion que vous jugerez nécessaire, je suis toujours à votre disposition.
Courtois serre cordialement la main à tout le monde et serait heureux d’avoir des nouvelles de Jean Mougin (Mangin?)* – tu m’en donneras dans ta prochaine lettre. Je n’ai pu voir Tortelier, sitôt que je le verrai je lui montrerai ta lettre.
Je termine en te recommandant de me rappeler au bon souvenir de ta compagne et de Mademoiselle ta nièce ainsi qu’à celui de tous les compagnons à qui je serre cordialement la main, ainsi qu’à toi.
Ton ami

Octave Jahn

Octave Jahn chez Duprat, rue Monsigny 13

* Jean Mougin s’en fut à Paris pour y faire ses études et mourut ….

Perquisition chez Pannetier Ernest Isidore, jardinier demeurant rue de l’Eau Bénite, n°6 à Troyes

AD Aube 5 U 268

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